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Fév

ABANDON DE POSTE ET PRESOMPTION DE DEMISSION

Une étude de la Darès fait ressortir que l’abandon de poste représente 71 % des licenciements pour faute grave ou lourde.

Au premier semestre, c’est quelques 123.000 abandons de poste qui ont justifié un licenciement sur les 171.000 ruptures de contrats à l’initiative des employeurs.

55 % des salariés ayant abandonné leur poste s’inscrivent à Pôle emploi dans les trois mois suivant leur licenciement, ce qui naturellement génère une charge significative pour la collectivité publique.

De quoi s’agit-il et en quoi la réforme de l’assurance chômage instituant la présomption de démission est-elle pertinente ?

L’abandon de poste est la situation par laquelle, sans justificatif (notamment médical) ni autorisation, un salarié ne se présente plus à son poste de travail.

Face à cette absence, l’employeur ne peut rester sans réaction : si en paie l’absence est traitée comme une absence injustifiée, privant le salarié de rémunération, elle n’est pour autant pas assimilée à une démission, qui doit être claire et non équivoque.

L’employeur doit donc mettre le salarié en demeure de justifier de son absence et de reprendre son poste, et en cas de persistance de la situation, il doit mettre en œuvre la procédure de licenciement. Laquelle ouvre mécaniquement droit aux allocations chômage (sous réserve pour le salarié de remplir les conditions d’éligibilité). Formidable manière pour un salarié de « s’auto-licencier » et de percevoir des allocations chômage…

Face à ces dérives, le législateur a introduit dans la Loi Marché du travail du 17 novembre 2022 une présomption de démission en cas d’abandon de poste : concrètement, un employeur confronté à l’abandon volontaire de son poste par un salarié pourra le mettre en demeure de justifier son absence et de reprendre le travail, par lettre recommandée ou lettre remise en main propre contre décharge. L’employeur devra accorder un délai au salarié pour s’exécuter. Si le salarié ne retourne pas au travail dans le délai imparti, il sera présumé démissionnaire. Et donc, ne sera pas éligible au chômage…

Le salarié présumé démissionnaire pourra contester la rupture de son contrat de travail auprès du conseil de prud’hommes, directement devant le bureau de jugement.

Les modalités d’application seront fixées par décret fin mars ; selon le projet de décret transmis aux partenaires sociaux le 21 février, le délai minimum laissé à un salarié pour reprendre son travail à la suite d’un abandon de poste serait fixé à 15 jours calendaires, à compter la « première présentation » de la mise en demeure par l’employeur.

Emilie Meridjen, associée en droit du travail