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Mai

LES MESURES SOCIALES DE LA SECONDE LOI D’URGENCE SANITAIRE DU 11 MAI 2020

La première loi d’urgence instituait l’état d’urgence sanitaire à compter du 12 mars et jusqu’au 24 mai prochain, nous vous en parlions ici.

Cette seconde loi d’urgence, publiée le 11 mai, prolonge la durée de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus.

Les mesures prises durant le confinement liées à la durée de l’état d’urgence (leur échéance étant déterminée en fonction de la date de fin de l’état d’urgence) se trouvent donc impactées par la prolongation. C’est le cas par exemple de la suspension des processus d’élections professionnelles.

Outre cette prolongation de l’état d’urgence, cette nouvelle loi instaure plusieurs mesures sociales majeures qui viennent compléter les précédentes :

La responsabilité pénale des employeurs pendant la période de crise sanitaire

Une obligation générale de sécurité pèse sur chaque employeur et impose de garantir la santé et la sécurité des salariés. Ainsi, en cas de non-respect des règles d’hygiène et de sécurité, mais aussi lorsque par sa faute personnelle, l’employeur met en danger la santé de ses salariés ou, porte atteinte involontairement à la vie et à l’intégrité physique des salariés, sa responsabilité pénale peut être engagée.

L’employeur est donc tenu de protéger ses salariés contre les risques liés à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de leur activité professionnelle ; en cas de manquement à cette obligation, sa responsabilité pourrait être engagée.

L’article 1 de cette loi prévoit que, lorsque la responsabilité pénale de l’employeur est engagée, les magistrats devront tenir compte des « compétences, du pouvoir et des moyens » dont disposait l’employeur dans la situation de crise ainsi que « de la nature de ses missions ou de ses fonctions ». 

Cette disposition a vocation à répondre aux inquiétudes des employeurs dans l’application de leur stratégie de déconfinement, alors que la situation est toujours remplie d’incertitudes.

Néanmoins, elle n’invite pas les magistrats à apprécier avec une plus grande tolérance les éventuels manquements de l’employeur mais à tenir compte des circonstances dans lesquelles ils s’inscrivent. Il pourrait s’agir, par exemple, de prendre en compte la pénurie de masques et de gel hydroalcoolique dans le cas où il serait reproché à l’employeur de ne pas en avoir délivré aux salariés pendant cette période de pénurie.

En cas de contentieux, l’employeur devra apporter la preuve qu’il a tout mis en œuvre pour protéger ses salariés par :

–     des actions de prévention

–     des actions de formation et d’information

–     la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés

Il convient donc de rester particulièrement vigilant sur les décisions prises et à prendre pendant la phase de déconfinement :

⇒ évaluation des risques liés au Covid-19 ou engendrés par les réorganisations qui en découlent,

mise à jour du document unique d’évaluation des risques,

information et formation des salariés etc.

En effet, des condamnations ont d’ores et déjà été prononcées à l’encontre de plusieurs entreprises, nous vous en parlions ici.

Protection contre le licenciement des personnes « mises en quarantaine » ou placées en « isolement »

Les deux lois d’urgence sanitaire prévoient des cas dans lesquels la mise en « quarantaine » ou l’« isolement » peut être imposé (il s’agit principalement des personnes revenant d’une zone dans laquelle le virus circule).

La seconde loi d’urgence précise que les salariés dont le contrat de travail est suspendu suite à une mise en quarantaine obligatoire bénéficient, à compter du 13 mai (date d’entrée en vigueur de la loi) des dispositions relatives à la suspension du contrat de travail en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle prévues à l’article L. 1226-9-1 du code du travail.

Ainsi, le contrat de travail du salarié en quarantaine ne pourra être rompu par l’employeur seulement en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à ce placement en quarantaine obligatoire.

Toutefois, ne sont pas visés les salariés faisant l’objet d’une mesure d’isolement, qui sont les salariés ayant été effectivement infectés. La quarantaine vise seulement les personnes potentiellement exposées au virus et non effectivement infectées.

Incidence de la mise en quarantaine obligatoire sur l’épargne salariale 

La loi prévoit également que ces mises en quarantaine obligatoires sont désormais assimilées à du temps de présence, et sont donc prises en compte dans le calcul de l’intéressement et de la participation (lorsqu’ils sont répartis proportionnellement à la durée de présence dans l’entreprise), à l’instar de la suspension du contrat pour accident du travail et du congé de maternité.

Quel est l’impact de la mise en quarantaine sur l’intéressement et la participation répartis en fonction des salaires ? La loi ne précise pas s’il faut prendre en compte la rémunération qu’aurait perçue le salarié s’il n’avait pas été mis en quarantaine…

Par ailleurs, il est prévu que la durée des périodes de suspension du contrat liées à la mise en quarantaine doit être prise en compte pour la détermination de tous les avantages légaux ou conventionnels, et ne peut entraîner aucun retard de promotion ou d’avancement.

 

Par Emilie Meridjen, Associée en droit du travail et Camille Janson, Collaboratrice en droit du travail