06
Mar

CORONAVIRUS : GERER L’EPIDEMIE DANS L’ENTREPRISE EN 4 POINTS

Par Emilie Meridjen, Associée en droit du travail et Camille Janson, Collaboratrice en droit du travail.

  1. Les mesures de prévention indispensables

Il est fortement recommandé aux entreprises de communiquer auprès de leurs salariés sur les mesures de précaution relayées par le gouvernement :

  • se laver les mains régulièrement,
  • tousser ou éternuer dans son coude,
  • saluer sans se serrer la main, éviter les embrassades,
  • utiliser des mouchoirs à usage unique,
  • porter un masque uniquement lorsque l’on est malade, sur prescription médicale.

Il est naturellement conseillé de suspendre tout déplacement dans les zones à risque et d’une manière générale, de limiter les déplacements non urgents et réunions.

Les salariés ayant été exposés au risque de contamination (soit parce qu’ils se sont rendus sur une zone à risque, soit parce qu’ils ont été en contact avec une personne contaminée) doivent se manifester auprès de leur employeur.

Par ailleurs, une analyse des aménagements organisationnels qui permettent de minimiser les risques de contamination (désinfection régulière des surfaces, TPE, poignées, etc) est recommandée au sein de chaque organisation.

L’ensemble de ces mesures devront être partagées et expliquées aux salariés.

 

  1. Un salarié revient d’une zone à risque ou a été en contact avec une personne contaminée : que faire ?

Il est recommandé de réorganiser le poste de travail du salarié concerné en privilégiant le télétravail pendant une durée minimale de 14 jours (période d’incubation de ce virus).

En principe, le recours au télétravail requiert de formaliser l’accord du salarié et de l’employeur. Néanmoins, le risque épidémique permet à l’employeur d’imposer le télétravail au salarié (L. 1222-11 du code du travail) ; dans ce cadre, aucun formalisme particulier n’est requis (néanmoins, pour éviter toute difficulté, il est recommandé de formaliser cet accord).

Si le télétravail ne peut être mis en place, l’employeur peut également recommander au salarié de contacter l’agence régionale de santé (ARS) pour demander un arrêt maladie le temps de la mise en quarantaine. L’arrêt maladie donnera lieu à une prise en charge au titre des indemnités journalières de sécurité sociale sans jour de carence (décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020). Un salarié qui doit garder son enfant faisant l’objet d’une demande de respect d’une période d’isolement peut également contacter l’ARS pour demander un arrêt de travail.

Si toutefois, le salarié revenait dans les locaux de l’entreprise durant la période de 14 jours, il est recommandé à l’employeur d’aménager son poste afin d’éviter le risque de contagion et de communiquer sur les règles sanitaires à respecter, notamment demander au salarié d’éviter les lieux où se trouvent des personnes fragiles, les réunions, les conférences, les contacts proches (ascenseur, cantine…).

Se pose la question de savoir si l’employeur peut-il imposer au salarié la prise de congés pour couvrir la période de 14 jours.

Si le salarié a déjà posé des congés sur une autre période à venir, l’employeur peut déplacer ces congés pour couvrir la période de 14 jours (article L. 3141-16 du code du travail).

En revanche, si le salarié n’a pas posé de congés, l’employeur ne peut lui imposer de prendre des congés sur la période de 14 jours.

 

  1. Un salarié exerce son droit de retrait : comment réagir ?

Un salarié peut refuser de se rendre sur son lieu de travail, après avoir alerté son employeur, s’il a un motif raisonnable de penser qu’il présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (articles L. 4131-1 et suivants du code du travail).

Peut être considéré comme « grave » tout danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée et comme « imminent », tout danger susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché.

L’appréciation des éléments pouvant faire penser que le maintien dans le poste de travail présente un danger grave et imminent relève, le cas échéant, du juge qui vérifie le caractère raisonnable du motif.

Plusieurs salariés ont d’ores et déjà exercé leur droit de retrait en raison du risque d’exposition au Coronavirus (les salariés du musée du Louvre par exemple ainsi que des salariés de compagnies de bus).

Le caractère justifié ou non de l’exercice du droit de retrait s’apprécie au cas par cas. A ce stade, la question de savoir si l’épidémie de Coronavirus constitue un motif valable pour exercer son droit de retrait est incertaine et il appartiendra au juge prud’homal de se prononcer.

La ministre chargée des Transports a pris position indiquant que l’exercice du droit de retrait ne serait pas justifié dès lors que l’employeur applique les précautions édictées par le gouvernement. Cette position est identique à celle qui avait été prise par le gouvernement au moment de l’épidémie de grippe H1N1 en 2009.

Par ailleurs, dans l’hypothèse où un employeur demanderait à un salarié de se rendre dans une zone ayant été déterminée comme étant à risque par le gouvernement (plus particulièrement en Chine puisque le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères déconseille les voyages en Chine sauf raison impérative et recommande de se tenir éloignés momentanément du pays et de différer les déplacements), l’exercice du droit de retrait pourrait être considéré comme justifié par la juridiction prud’homale. De même, une personne fragile serait plus susceptible de voir reconnaître l’exercice de son droit de retrait comme légitime.

 

  1. L’entreprise subit une forte variation d’activité du fait de l’épidémie : quelles solutions ?

Les entreprises pourraient potentiellement recourir à l’« activité partielle ». Ce dispositif permet, dans des circonstances exceptionnelles, de fermer l’établissement ou de réduire la durée du travail des salariés. Les salariés bénéficient d’une indemnité de 70% de leur rémunération antérieure brute et l’employeur bénéficie d’une allocation cofinancée par l’Etat et Pôle emploi. Le recours à ce dispositif n’est possible qu’à condition d’avoir obtenu une autorisation de l’Administration (la demande doit être formulée sur ce site : https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/).

L’employeur peut demander aux salariés de poser des congés pour une période proche mais cela ne pourra intervenir qu’avec l’accord de ces derniers.

En cas de difficultés persistantes, le recours à des licenciements économiques pourrait s’avérer nécessaire.

 


A propos du cabinet Sekri Valentin Zerrouk

Firme indépendante d’une cinquantaine d’avocats, Sekri Valentin Zerrouk conseille des entreprises multinationales, des fonds d’investissement de premier plan, des ETI, PME et entrepreneurs dans le cadre du déploiement de leurs activités commerciales et de leurs opérations d’acquisition, de cession ou de restructuration en France et à l’étranger.

Avec plus de 300 opérations transactionnelles réalisées au cours des 10 dernières années, Sekri Valentin Zerrouk est aujourd’hui l’un des cabinets les plus reconnus sur le secteur des transactions Mid-Market, notamment en immobilier.

Sekri Valentin Zerrouk compte également parmi les cabinets les plus innovants du marché au travers du lancement de MySVZ (plateforme digitale) et du LegalCluster (accès à un écosystème de plus de 200 avocats à travers le monde, sélectionnés parmi les meilleurs), deux innovations importantes au service de la relation client.

Les 11 associés sont : Franck Sekri, Pierre-Emmanuel Chevalier, Géraud de Franclieu, Emmanuelle Vicidomini et Sylvain Paillotin  (Fusions & Acquisitions, Private Equity, Financement, restructuring), Emeline Peltier (Immobilier), Yamina Zerrouk (Droit Public des Affaires, Urbanisme et Immobilier), Jérôme Assouline et Thomas Verdeil (Droit Fiscal), Emilie Meridjen (Droit Social) et Anne Dumas-L’Hoir (Contentieux des Affaires).

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