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ACTIVITÉ PARTIELLE : DES REVIREMENTS MAJEURS OPÉRÉS PAR L’ORDONNANCE DU 22 AVRIL 2020

 

Dans le cadre de la loi d’urgence sanitaire, une nouvelle ordonnance a été votée le 22 avril en conseil des ministres et est entrée en vigueur hier. Parmi les thèmes abordés : l’activité partielle dont le régime est à nouveau modifié. Cette ordonnance opère des revirements majeurs concernant ce dispositif, vous en trouverez la synthèse ci-après.

Evolution du champ des exonérations de cotisations sociales sur les indemnités d’activité partielle (article 5)

Par principe, l’indemnité d’activité partielle est exonérée de cotisations sociales. Une ordonnance du 27 mars 2020, avait été précisé que si l’employeur versait au salarié une indemnité complémentaire (au-delà de l’indemnité légale de 70 % de la rémunération brute), ce complément suivait le même régime exonératoire que l’indemnité légale.

L’article 5 de l’ordonnance plafonne l’exonération de cotisations sociales applicable à l’indemnité d’activité partielle : l’exonération sera désormais limitée à hauteur de 70 % de 4,5 fois la valeur du salaire  (soit, 3,15 SMIC) ; le complément versé par l’employeur au-delà de cette limite sera donc soumis à cotisations sociales.

Cette nouvelle règle sera applicable à compter du 1er mai 2020.

Revirement sur la prise en compte des heures supplémentaires (article 7)

En principe, seules les heures chômées, dans la limite de la durée légale de travail (35 heures), sont indemnisables au titre de l’activité partielle ; dès lors, les heures supplémentaires habituellement effectuées par le salarié (parce qu’elles sont prévues dans son contrat ou par la convention collective par exemple) n’étaient pas indemnisables. Il en résultait qu’un salarié soumis à une durée du travail de 39 heures n’était indemnisé que sur la base de 35 heures.

L’ordonnance ouvre droit à indemnisation pour les heures supplémentaires chômées dès lors qu’elles résultent d’un accord collectif ou d’une convention individuelle conclu avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance.

Nouvelles conditions de mise en place de l’activité partielle de façon individualisée ou selon une répartition non-uniforme des heures de travail (article 8)

En principe, la mise en place de l’activité partielle était subordonnée au caractère collectif de la mesure qui devait donc viser un groupe bien identifié de salariés (établissement, service, atelier…) et ne pouvait pas en concerner qu’un seul. En cas de réduction d’activité, l’employeur était donc contraint de mettre en place un roulement pour faire travailler les salariés alternativement.

L’ordonnance permet de déroger à cette règle en autorisant la mise en place l’activité partielle individuellement ou selon une répartition non uniforme des heures chômées ou travaillées au sein d’un même établissement, service ou atelier.

Cela n’est toutefois possible qu’à condition de conclure un accord collectif, ou à défaut d’accord, après avis favorable du CSE ou du conseil d’entreprise.

L’employeur doit prévoir, dans l’accord ou dans le document soumis au CSE :

  • « les compétences identifiées comme nécessaires au maintien ou à la reprise de l’activité de l’entreprise, de l’établissement, du service,
  • les critères objectifsliés aux postes, aux fonctions occupées ou aux qualifications et compétences professionnelles, justifiant la désignation des salariés maintenus ou placés en activité partielle ou faisant l’objet d’une répartition différente des heures travaillées et non travaillées,
  • les modalités et la périodicité, qui ne peut être inférieure à 3 mois, selon lesquelles il est procédé à un réexamen périodique des critères susmentionnés afin de tenir compte de l’évolution du volume et des conditions d’activité de l’entreprise en vue, le cas échéant, d’une modification de l’accord ou du document,
  • les modalités particulières selon lesquelles sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés concernés,
  • les modalités d’information des salariés de l’entreprise sur l’application de l’accord pendant toute sa durée».

Adaptation à venir des modalités de consultation du CSE dans le cadre de la reprise d’activité (article 9)

L’ordonnance prévoit qu’un décret adaptera les délais de consultation du comité social et économique (CSE) dans le cadre de l’article L. 2321-8 du code du travail posant l’obligation de consulter le CSE sur les conditions d’emplois et de travail des salariés.

Cette modification devrait permettre aux entreprises de reprendre une activité tout en veillant à la protection de ses salariés.

 

Par Emilie Meridjen, Associée en droit du travail et Camille Janson, Collaboratrice en droit du travail