05
Fév

La Redoute et Relais Colis

La fiducie, structure juridique en place depuis 2007, est de plus en plus utilisée dans le cadre de restructurations
d’entreprises.
Kering (ex-Pinault Printemps Redoute), le groupe de luxe et d’habillement sportif, a choisi la fiducie pour financer les
garanties sociales dont bénéficieront les salariés de La Redoute. Il avait officialisé en décembre dernier la cession de
l’entreprise aux dirigeants de l’enseigne, qui a dans la foulée annoncé des suppressions de postes.
Qu’est-ce que la fiducie? Il s’agit d’un mécanisme juridique reconnu en France en 2007, dans le cadre duquel on transfère
temporairement des biens ou des droits à un professionnel. Il les gère dans l’intérêt d’un bénéficiaire et ceux-ci sont
séparés du reste du patrimoine, ce qui assure leur sécurité.
Dans le cas La Redoute, cela permet d’assurer les garanties promises par Kering aux salariés qui feront l’objet du plan
social, et donc d’assurer leur avenir, même lorsqu’ils seront sous la responsabilité du repreneur.
Une garantie pour les salariés
« C’est la société qui est responsable du plan social qui doit le financer, explique Jean-Claude Blanquart, délégué CFDT.
La fiducie permet de bloquer l’argent sur un compte pour garantir aux personnes qui en sont bénéficiaires qu’elles
toucheront bien ce qu’elles doivent toucher, même si l’entreprise qui cède ou le repreneur sont en difficulté. »
Ce projet de fiducie était discuté depuis quelque temps entre Kering et les syndicats de La Redoute. Mais ce n’est pas la
première fois qu’un tel mécanisme est utilisé dans le cadre d’une cession ou d’une restructuration.
Contrairement au monde anglo-saxon, le législateur a tout fait en France pour que la fiducie, ou « trust » en anglais, ne
soit pas utilisée à fin d’optimisation fiscale. « On attendait ici la fiducie comme un outil de sûreté pour un financement. On
ne l’attendait pas forcément dans le domaine social », souligne Maître Jean-Marie Valentin, avocat expert de la fiducie.
En 2008, il a participé à la création d’une fiducie lorsque le groupe Shell a vendu le site pétrochimique de l’Étang de Berre
au groupe LyondellBasell. C’est la Caisse des dépôts, l’un des principaux professionnels du secteur avec la société
Equitis, qui a été chargée de gérer cette fiducie.
Un outil qui se développe
Depuis, d’autres fiducies à but social ont vu le jour: lors de la cession du groupe chimique Arkema au groupe Klesh, lors
de la reprise de raffineries de Petroplus… Généralement, ce modèle est utilisé par des entreprises importantes, qui
veulent limiter le déficit d’image lors d’un plan social.
« Au départ, l’outil était vu comme une conquête des organisations syndicales. Mais désormais, ce sont parfois des
groupes qui viennent vers nous, soucieuses d’un dialogue social apaisé ou parce que les salariés peuvent se retourner
contre leur ancien employeur si les obligations promises n’ont pas été honorées, explique Maître Jean-Marie Valentin. On
constate que cet outil est davantage utilisé depuis trois ans. Il y a aujourd’hui une douzaine de fiducies qui ont été créées
lors de plans sociaux ou même à titre préventif, pour faire face à des plans sociaux futurs qui seraient faits par le
repreneur. »
Prendre en compte les risques futurs
À La Redoute, certains espèrent aussi que cette fiducie prendra en compte les potentiels départs supplémentaires: « Pour
Kering, la fiducie ne doit couvrir que les postes concernés par le plan. Mais nous nous inquiétons quant à d’éventuelles
autres suppressions, car des pertes sont encore prévues sur les deux années à venir, affirme Jean-Christophe Leroy,
délégué CGT chez La Redoute. Kering a prévu une recapitalisation à hauteur de 315 millions d’euros, mais que se
passera-t-il si va plus mal que prévu? » Pour l’heure, les mesures sociales que devra garantir cette fiducie sont toujours
en cours de négociation entre Kering et les syndicats